Venez on rit

Allez. 

J’ai compris qu’on pouvait nous voler à peu près tout. Notre argent, notre jeunesse, notre chien, notre Iphone, nos vélos, nos voitures, notre innocence, nos œufs, nos bœufs, mais pas l’humour. 

J’ai compris aussi, que rire c’était à n’en pas douter le meilleur moyen de vivre. De survivre même allez. 

Écrire un texte sur le rire mais vous mettre un bon gouffre. Clown triste la fille. Mais imaginez ce que serait la vie, si on riait tous plus souvent ? Si on riait communément ? Si on faisait l’humour passionnément ? En marchant, dans les transports, dans les magasins, au travail. Le vivre-ensemble du LOL. Ahah.ohoh.huhuh.

J’ai ce souvenir très net, c’était un après-midi d’hiver. Décembre ou janvier peut-être. Le wagon du métro, ligne 4, était plein à dégueuler, les gens moites sous leurs strates de sapes, les sourires disparus, les traits tirés, les gueules de merde. Et ce chauffeur en tête du gros vers métallique chargé d’âmes mortes qui prend le micro, même pas pour nous avertir que des roumains de onze ans étaient là pour piquer dans nos pockets, mais pour faire une blague. J’ai oublié la vanne mais je n’ai pas oublié les rires. Il restait deux trois connards bien décidés à ne pas tomber dans ce piège heureux mais dans l’ensemble les gens se sont déridés. C’était l’époque des bouches nues. Cet épisode m’a transportée, sens propre et figuré.

J’ai toujours aimé rire. Je sais qu’il y a des gens pour qui c’est secondaire, chez moi c’est vital. Comme peuvent l’être le soleil, la littérature, l’amour, le brie et les coupe-ongles. Vital.

C’est même un critère clé dans ma traque au mâle. Je ne dis pas non à une leuleu avec un BG maxigaulé après une batchata torride mais si je dois choisir entre un beau gosse qui fait des blagues toto et un laid qui me gâte de vannes qualibrées, le choix est vite fait. Je prends le beau gosse. Pétédéère.

Reste à préciser ; je préfère quelqu’un de vraiment plombant que de faussement drôle. Les comiques à la vanne hémorragique, sans pause, sur tout, pour rien, me sont plus difficiles à supporter que les chansons de Calogero.  

Je ris en regardant Ricky Gervais, Will Ferrell et François Damiens.
Je ris de tout.
Je ris pour rien.
Je ris quand on me chatouille (mais assez rapidement je pleure et je parle mal).
Je ris quand Romy m’imite.
Je ris quand ma sœur danse comme une beauf.
Je ris quand ma mère est bourrée.
Je ris quand mon père rit.
Je ris de blagues lourdes.
Je ris des heures entières après avoir dessiné au marker une verge molle sur le front d’un être soul et tout aussi mou que la verge.
Je ris d’avoir mis un morceau de boudin noir dans la poche du manteau de Tessa.
Je ris quand je repense au moment où j’ai trouvé le morceau de boudin dans ma valise, tassé.
Je ris devant « N’oubliez pas les paroles ».
Je ris aux blagues nulles.
Je ris devant Canteloup. Pas du tout.
Je ris devant les enfants qui dansent et chantent comme des merdes à la kermesse, devant ceux qui tombent aussi. « C’est pas drôle Laura ». Ah ben si c’est drôle, je suis désolée.
Un enfant qui tombe, c’est drôle.
Je ris des discours de témoins, les interminables, les gênants.
Je ris quand les gens s’énervent.
Je ris quand il ne faut pas.
Je ris quand j’achète des chips à la crevette pour Adrien juste parce qu’il est cambodgien, ou chinois, ou japonais. Vietnamien ? J’sais plus. Ça le fait rire, jaune. Comme par hasard.
Je ris de l’humour de violente viande, Kookslam, Samourais, Thomas Lelu, Yugnat999, Brainmagazine, Ornella Fleury, le Gorafi…
Je ris aux larmes.
Je ris aux éclats.
Je ris au nez.
Parfois même je ris pour ne pas pleurer.

Alors, je sais, le rire est subjectif. C’est une affaire de goût. Il faut faire feu de tout bois. 
Mais pour autant, peut-on se marrer de tout ? 
Vraie question, faux débat. 
À partir du moment où on a fait d’Anne Roumanoff et Roland Magdane (répit pour Olivier de Benoist) des humoristes, on a validé l’idée que l’on pouvait rire de tout. 
Et surtout de rien. 

Pourquoi les belges portent des bretelles ?
Pour tenir leur pantalon. 

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