Les radins

Les radins, donc.

Encore une fois je ne parle pas des gens dans le besoin. Je préfère préciser avant de me retrouver pendue sur la place publique des internets par des détracteurs venus parler de bienveillance tout en me traitant de connasse snobinarde et méprisante. Ce qui n’est pas totalement faux mais il est important quand même de reconnaitre que je suis rarement injuste.

Je vais parler des radins atteints de radinerie, ceux qui ont de l’argent mais personne ne sait à quoi ça leur sert. Pas même eux.

Vaste sujet qui m’a demandé de faire une visite dans les couloirs de ma vie pour faire le point sur tous les radins que j’avais eu l’occasion de croiser jusque-ici. Et ils sont plus nombreux que les autres. 

Les autres étant les gens généreux. 

Ce qui n’est pas sans intérêt, c’est de constater que le radin ne se range pas dans une seule case « il est radin point ». Non. Et il m’est apparu évident lors de mes investigations sur cette espèce qu’il existe en réalité moult catégories de radins. 

Il y a le radin assumé : lui c’est le plus trash et en même temps le moins stratège. Il se moque bien de savoir ce qu’on pense de lui et assume pleinement d’être un énorme crevard. C’est plus des oursins qu’il a dans les poches c’est des scies circulaires. Il porte dix pulls en hiver plutôt que de mettre du chauffage, il se nourrit aux produits périmés, il se meuble aux encombrants, il repart avec sa bouteille de vin si elle n’a pas été finie à un diner (quand il prend la peine d’en apporter une), il fait des participations de 3 euros sur des cagnottes Leetchi sans masquer son nom, il divise tout au centime près, il se connecte sur le wifi du voisin et collectionne les coupons de réductions pour être sûr de payer le moins de choses possible en caisse (si vous le cherchez il est forcément devant moi, je choisis toujours la file de merde, c’est l’histoire de ma vie). 

Le radin méchant : il est rare, thanks god, mais il existe. C’est celui qui, à la grande surprise de tout le monde, offre un très beau cadeau à Noël et le remet sous le sapin l’année d’après. Dans un paquet neuf. Cette histoire est basée sur des faits réels. Ou mon ancienne boss qui me dit en me voyant donner cinq euros à un SDF dans le métro « mais ça va pas bien ?? Cinq euros ?! Donne-les-moi la prochaine fois LOL ».

Le radin mytho : c’est le diable. Il excelle dans l’art de l’imposture. Tout le monde le trouve engagé, subversif, passionné, humaniste… C’est juste un gros rat. Et on en connait tous un comme ça. C’est lui qui se cache derrière des grands discours sur la noirceur de l’espèce humaine, celle qui détruit notre planète et fait travailler les enfants en Chine uniquement pour endormir tout le monde sur le fait que c’est la pire des pinces. Il justifie de ne prendre qu’une douche par semaine par souci écologique mais prend un bain chaque soir quand il vient chez toi. Il offre uniquement des cadeaux de seconde main parce qu’il dit vomir la surconsommation mais est bien content d’avoir la dernière paire de Nike à son anniversaire. Il ne roule qu’à vélo pour protéger la couche d’ozone mais t’emprunte ta caisse dès qu’il en à l’occasion et se dit vegan pour ne pas avoir à acheter de viande quand il reçoit mais prend une côte de bœuf si tu l’invites au resto. « Mon médecin m’a dit que je manquais de fer, ça m’emmerde hein, pauvre bête, mais la santé ça passe avant le reste ». Pauvre bête oui.

Le radin convivial : pénible lui aussi. Il arrive à disparaitre dans un coin du bar pour parler des choses de la vie avec des inconnus juste pour ne pas être là au moment où tout le monde sort sa carte « ah putain les gars, je suis désolé j’étais absorbé par l’histoire de ce mec, c’est fou comme on peut faire des rencontres incroyables dans la vie ». C’est fou surtout comme c’est à chaque fois quand on paye non ? C’est celui qui se fait toujours inviter chez les autres en vacances sous prétexte qu’il adore vagabonder et se sentir libre. Un peu ici, un peu là. Au début il dit qu’il passe deux jours et il décale son départ trois fois car « qu’est-ce qu’on est bien ici tous ensemble ». Je le bute. C’est celui aussi qui organise un diner parce qu’il est sympa, qui dit à tout le monde de venir avec un truc et tu réalises rapidement qu’il n’a absolument rien acheté de son côté. Un peu le même que ce pote au nouvel an qui dit « ok donc Justine tu prends le foie gras, Marc le champagne, Louise les huitres et le saumon, Jeanne la Bûche et le fromage, moi je m’occupe du pain j’ai une boulangerie de dingue à côté de la maison ».

Le radin dépensier : c’est un cas assez paradoxal mais je suis sûre que ça va tout de même vous parler, il est souvent assez riche, il dépense sans compter mais que si c’est pour lui. Et s’il fait l’effort de faire un cadeau, il dira forcément le prix à la personne qui le reçoit en ajoutant une bonne phrase de merde du type « je ne me suis pas foutu de ta gueule j’peux t’dire » et lui rabâchera pendant des mois combien il a été généreux sur ce coup.

Et puis il y a tous ceux qui sont considérés comme « économes ». Ces radins qui réussissent à brouiller les pistes. Dupez qui vous voulez. 

Combien de fois j’ai entendu cette phrase « non j’suis pas d’accord, il n’est pas vraiment radin, il est économe ». ECONOME ? Mais tu es économe quand tu mets un peu de sous chaque mois sur ton compte épargne pour payer tes vacances, pas quand tu demandes à un pote de te rembourser une tradition aux graines.

En fait le vrai problème avec la radinerie ça n’est pas tant le fait que ces gens-là aient du mal à claquer quatre euros pour un Coca et s’éclairent à la bougie mais plutôt que la radinerie révèle beaucoup d’autres aspects de la personnalité. Ça dénote juste, j’ai bien étudié le sujet, un énorme manque de générosité. Pas la générosité de l’argent, l’autre, celle de l’amour.  

De mon côté j’ignore si je suis la plus généreuse du monde mais une chose est sure, pour citer les personnes nées avant 1950, je ne serai pas la plus riche du cimetière. Je suis complètement celle qui va toucher 2500 euros et qui va en dépenser 3000. Lucide sur ma propre situation financière, celle d’une journaliste free-lance, tout est dit, je suis quand même la première à payer ma tournée, gâter mes proches et à me lever le matin en suivant l’adage « on a qu’une vie ». Ça n’est d’ailleurs pas un hasard si je me retrouve à 32 ans avec sur mon PEL de quoi acheter, au mieux, un mobil home dans le limousin.

P.S : la vraie richesse elle est dans le cœur mes frères. 
D’accord, j’arrête.

3 commentaires

  1. Quelle étude de comportement ! Tu as fait psycho dans une autre vie ? Je crois que tu n’as rien oublié. Très amusant et toujours très bien écrit.
    Félicitations !👏👏👏👏👏👏

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  2. Oh mais merci! Pour la petite histoire, j’étais avec un mec radin (Jamais vu la couleur de sa carte bleue, je payais tout et un jour il m’a invitée à un concert gratuit, j’ai fait une attaque de panique). Évidemment, j’étais trop gênée pour lui en parler. Et comme on m’appelle subtilité, un matin je décide de lui parler de « mes amis radins, tu sais, je ne les vois plus, c’est vraiment trop pénible ». Et la réponse qui tue: « oh mais ils ne sont peut-être pas radins, ils sont peut-être juste PARCIMONIEUX »
    Parcimonieux sa mère, je suis partie sans demander mon reste.

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