Les EVJF

Je sens que je risque d’étoffer encore un peu la liste des gens qui me veulent du mal, mais j’aimerais vous parler aujourd’hui de mon point de vue sur une tradition que je juge discutable : les EVG et les EVJF. Enterrement de vie de garçon et enterrement de vie de jeune fille, donc. 

Mon âge avancé (je fais une petite dépression passagère de bientôt deux ans depuis que j’ai eu trente ans) et mes relations font que j’y ai maintenant le droit chaque année ou presque. Quand je n’arrive pas à trouver une excuse valable pour me défiler (j’attends présentement que les messages acerbes s’affichent sur mon portable).

Et pourtant, ceux qui me fréquentent pourront le dire, la fête ça me connait.

Anniversaires, pots de départ, pacs, bar mitzvah, tout évènement fédérateur où les gens s’aiment et boivent des mélanges qui soulent font de moi une femme heureuse. 

Même aux mariages je mets le feu, je joue le jeu. Je danse le Madison, je crie d’enthousiasme au moment où la mariée exhibe sa jarretière (alors que rien au monde ne me donne plus envie de disparaitre. À part peut-être le duo Ève Angeli x Francky Vincent), j’écoute en souriant les discours gênants, je ris des mères bourrées qui chaloupent à 4 du mat… En vrai, à tout ça moi je dis : pourquoi pas. Le caméléon que je suis ne recule devant aucune expérience anthropologique. 

Mais QUID de cette fête célébrée quelques semaines avant la tant attendue union pour enterrer ce qu’il vous reste de liberté et de jeunesse ? Parce qu’à priori c’est quand même bien de ça dont il s’agit. ENTERREMENT DE VIE DE JEUNE FILLE. Plus j’essaie de comprendre le concept, plus il m’échappe. 

Tout le monde a pourtant l’air de trouver ça OK que la future mariée s’isole avec ses copines, le futur marié avec ses copains et que tout ce petit monde se la colle gaiement pendant 24h (à minima) pour jouir de la vie avant que le mariage ne vienne la gâcher. J’ai un faible pour le pathétisme pourtant hein, mais là, bon. 

Et je ne parle même pas des différents supplices auxquels il est possible de faire face. Allez si, j’en parle.

Déjà, et c’est de là que naissent les heurts, il est rare que tout le monde se connaisse dans le groupe. C’est souvent un condensé des meilleures amies de la mariée à travers les époques, avec sa belle-sœur et sa cousine en prime. Une dizaine de personnes aux profils possiblement disparates qui vont devoir cohabiter dans la bonne humeur pendant plusieurs jours/heures. Et dans le lot il y en a toujours qui pensent pouvoir tout organiser sous prétexte qu’elles la connaissent depuis plus longtemps. Malheureusement, le passé nous a à tous prouvé que ce n’était pas nécessairement une bonne idée. Depuis plus longtemps ne veut pas dire qu’on la connait mieux, ça veut juste dire qu’on la connait depuis plus longtemps.

L’enfer commence à la création du groupe Whatsapp. 

Quand tu lèves les yeux de ton portable pendant deux heures et qu’à ton retour au monde connecté tu as reçu plus de notifications que le jour de ton anniversaire. On va où ? On fait quoi ? On loue quoi ? On loue qui ? 

L’avantage du groupe Whatsapp c’est que très vite tu comprends qui est qui et dans quelle mesure cet EVJF va être une épreuve dans ta vie. 

Tu as la friquée, celle qui suggère comme si tout était normal qu’on parte cinq jours à St Barth dans une villa avec piscine, elle dit des choses qui nous donnent envie de mal lui parler comme « il y a des billets pas trop chers en hors saison ».

Il y a la pauvre aussi, celle qui vit sa modeste vie et qui n’a pas les moyens de claquer 300 balles dans un week-end. À ne pas confondre avec la pince, celle qui gagne beaucoup d’argent mais qui sort des phrases comme « moi par-contre les filles, je vais avoir du mal à mettre plus de 75 euros je pense ». Ah bon, ben c’est pas grave t’inquiète, on va faire un paint ball et un Flunch. 

Tu as la relou, celle qui trouve un truc à redire dès que quelqu’un propose une idée mais qui ne propose rien en retour « euh ça en vrai je pense qu’elle va détester, ce n’est pas du tout son genre », « lol c’est vu et revu ce truc », « je ne veux pas faire ma relou mais c’est pas un peu ringard ? », « Comptez pas sur moi pour faire ça ». Le nombre de fois où j’ai écrit puis effacé : et est-ce que mourir ça te chauffe ?

La ringarde est souvent au cœur des attaques de la relou mais rien ne peut sabrer sa fougue. C’est celle qui nous demande nos tailles pour faire imprimer un tee-shirt que l’on devra toutes porter dans le train qui nous emmène en enfer (avec un « Team Chloé » floqué sur les seins), celle qui prévoit un diadème pour la mariée, c’est elle aussi qui évoque sans vergogne la possible intervention d’un strip-teaseur (dites-moi quelle femme est excitée par un homme en slibard qui fait des U.V, se tartine d’huile, s’épile les couilles et se trémousse sur du Beyoncé ? J’ai très envie de savoir).

Et puis tu as celles que tu découvres le jour J. La nympho, celle qui lâche les chevaux parce qu’elle est loin de sa vie chiante et qui a la culotte fugueuse après trois verres. Et la bourrée, celle qui ne tient pas l’alcool et qui devient ingérable avant même que la soirée commence (elle est souvent très embarrassante, parle mal aux gens, danse bizarrement et se met à vomir partout avant que minuit sonne).

Moi ? Je suis celle qui attend que ça passe.

Je n’ai pas parlé des hystéros bruyantes et pleines de Smirnoff qui, vêtues de tutus et d’ailes de fée, marchent en bande et arrêtent les gens dans la rue. J’ai peur d’aller trop loin.

Ce papier est un message détourné à mes amies que j’aime tant mais qui peuvent aussi avoir, parfois, de vraies idées de merde. S’il vous vient l’envie déraisonnable de m’organiser un EVJF sachez que rien ne peut me faire plus plaisir qu’un week-end à la campagne à jouer à Code Names (Claire et Popo je ne vous veux pas dans mon équipe en revanche), boire du bon vin, manger des crêpes au Nutella, twerker sur Cardie B, chanter du Céline, chanter du Cardie B, twerker sur Céline. Et que toute tentative d’humiliation fera l‘objet d’une désinvitation à mon mariage. Mariage qui pourrait bien ne jamais avoir lieu. Sylvain, si vous me lisez. Merci, bonne soirée. 

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